Sub 3h au Marathon de La Rochelle 2023
2 ans après mon dernier marathon sur Vannes en 2021, mon record personnel est de 3h11'07 sur cette distance. Signé à Barcelone, en 2019. Mais à l’époque, j’étais plus jeune :)
Et surtout, j’avais un peu mieux préparé l’épreuve.
Parce que là…
J’arrive à La Rochelle la veille de la course avec un entrainement totalement chaotique. Une grosse entorse de la cheville survenue mi-Octobre et qui va m’handicaper durant 4 semaines. Et couplé à une opération chirurgicale, ma préparation sera complètement nulle pendant une — trop — longue période.
Résultat, 15 jours avant l’épreuve j’ai juste le temps de faire 2 ou 3 sorties de course à pied. Et de reprendre quelques entrainements cardios sur Zwift.
Il n’empêche, je suis quand même là pour tenter de faire mieux que mon PB de Barcelone.
Mission impossible, certes.
Mais qui ne tente rien n’a rien.
Samedi, veille de course
La veille de course, c’est un peu toujours la même chose. Le retrait du dossard dans un premier temps. Pour ensuite aller se poser, préparer ses affaires, s’alimenter correctement. Et faire dodo tôt pour être le plus frais possible le lendemain matin.
Dimanche : jour de course
J’arrive 20 minutes avant le départ de la course dans mon SAS. Je me retrouve aux avant-postes, juste derrière les élites et autres champions. Il fait hyper froid, et je m’échauffe rapidement pour ne pas geler sur place.
Et rapidement, c’est le décompte…
3… 2… 1… 9h : le départ est lancé !
Immédiatement, tout le troupeau qui m’entoure part très vite. Et je suis partagé entre l’excitation et la volonté de tenir leur rythme.
Mais j’ai déjà 6 marathons à mon actif, et je sais qu’il faut être prudent. Et jouer le temps long pour ne pas se cramer bêtement. Alors, j’essaye de faire un “50/50”. Comme il fait très froid, je m’attends à ce que ma température corporelle ne grimpe pas trop — malgré la difficulté de l’épreuve.
Alors, j’accélère mais sans trop forcer.
Et je me mets sur un rythme légèrement inférieur à celui de mon semi-marathon, aux alentours de 3'55/4'00 au kilomètre.
Ainsi, les premiers hectomètres se déroulent rapidement : on contourne le port de La Rochelle, en direction de l’Aquarium. Pour entamer une première boucle sur une partie de cette belle ville.
A cet instant, je comprends mieux pourquoi le Marathon de La Rochelle se revendique comme étant le 2nd Marathon français : le public est très nombreux, l’ambiance est folle.
Et très familiale : beaucoup d’enfants et de parents, en train de clamer les noms des papas et mamans héros du jour.
Beaucoup de joie.
Bref, une belle ambiance de fête !
Coté météo, ça se présente bien aussi : il fait froid. Un froid sec. Et aucune pluie à l’horizon. Donc un parcours qui ne devrait pas être excessivement glissant, ni dangereux. Surtout au départ, car on est très groupés au début. Et j’ai toujours peur de glisser, de me faire bousculer, de perdre l’équilibre…
Kilomètre 2
Je croise Sylvain qui scande mon nom.
Et ça me fait super plaisir !!
Merci coach :)
Je sais que je dois revoir Sylvain sur d’autres intersections. Vers le 10e, le 20e et le 30e kilomètre. Du coup, j’ai découpé ainsi l’épreuve mentalement. Je fonctionne toujours ainsi pour les grosses courses : mieux vaut se donner plusieurs objectifs intermédiaires, pour mieux atteindre l’objectif final. Du coup, il me reste 8 kilomètres avant d’atteindre le premier quart de la course — à l’autre extrémité de la ville.
Kilomètre 10 : 41'19–4'09/km
Jusque là, tout roule. Je cours sur un rythme moyen qui tourne entre 4'01 et 4'08 d’après Strava. Malgré ma récente guérison, aucune douleur à signaler côté cheville.
Bref, tout se présente bien.
D’autant que des bornes sont visibles régulièrement pour indiquer notre projection en termes de chrono final : 2h52'00. Je n’en croyais pas mes yeux… 4 semaines auparavant, je marchais encore à pattes dans mon salon pour aller me servir un café. Et là, je suis en train de titiller le PB de Jenson Button, au marathon de Londres 2015 — en 2h52'30 !
Quelques difficultés du parcours — et un écart de 10 secondes pour aller jeter un déchet dans une poubelle — sur cette portion de la course m’indiquent ensuite un 2h53'00.
Mais ça reste insensé à mes yeux… Là, le risque c’est d’exploser en plein vol.
D’avoir les yeux plus gros que le ventre.
Et d’en faire trop.
Kilomètre 19 : pause pipi
Un arrêt rapide d’environ 30 à 35 secondes. Il n’empêche, je suis de retour dans le centre de La Rochelle à la fin du semi-marathon en 1h27'52. Ce qui signifie que je suis toujours sur un rythme inférieur au cap des 3 heures, en 2h56 environ.
Kilomètre 25 : 1h44'10
Les kilomètres continuent de défiler, le public est toujours au rendez-vous. Toujours pas de douleur critique.
Puis, je sens qu’une grosse fatigue commence à se montrer au 28/29e kilomètre. Sur le parcours, j’ai géré mon alimentation de manière très simple : 1 gel au 11e km, après 45 minutes d’effort.
Puis, uniquement des petites gorgées d’eau. A chaque stand croisé sur la route.
Mais je commence surtout à avoir une perte de lucidité.
Ma concentration est un peu plus défaillante, je cours un peu comme un robot. Comme je ne connais pas trop la ville — mais que j’en suis à la seconde boucle — je reconnais brièvement le parcours. Mais la distance qui me sépare de l’arrivée me semble subitement très lointaine.
Kilomètre 30 : 2h05'58
Mon rythme a légèrement baissé. Passant d’un 4'10/km à un 4'20/km, voire 4'25/km. Je sais que si je veux “faire un coup”, pas besoin de mettre un boulevard devant les meneurs d’allure du 3h : terminer en moins de 3h serait déjà un excellent résultat.
Et tellement inespéré...
Alors, je laisse les autres autour de moi continuer à tenir la cadence.
Et je lâche un peu de lest.
Pour maintenir cet objectif réalisable.
Ce qui ne m’empêchera pas de remonter quelques concurrents ! Dont un, en sortie de virage, qui va crier un “Nooooooonnn !!!!! Pas maintenaaaaannnnttttttt !!!!!”. Totalement crampé, il n’arrive pas à se relancer. Ou d’autres encore qui se plaignent d’ampoules — mes pieds étaient tartinés de Nok, j’avais prévu le coup ;)
Petit bonus au mental : je recroise Sylvain
Qui m’encourage.
Et ça fait rudement plaisir :)
Je tire ainsi jusqu’au 32e kilomètre : il reste alors 10 bornes à courir.
Kilomètre 35 : 2h27'56
Il me reste donc 32 minutes et 4 secondes pour parcourir les 7 kilomètres restants. Et ainsi passer sous la barre des 3 heures.
A ce stade de la course, je commence à y croire vraiment.
Même si je secoue bêtement la tête en me demandant encore comment c’est possible…
J’essaye de rester lucide et concentré sur mes pas.
Et les yeux rivés sur ma montre pour doser correctement ma vitesse. On est de retour sur le front de mer. Et on distingue au loin les tours du port de la Rochelle, qui symbolisent l’arrivée de cette course.
Kilomètre 39
L’arrivée n’est plus qu’à 3 kilomètres. Et j’entends des gars surmotivés derrière moi en train de gueuler “Allez les gars, on lâche rien, c’est maintenant qu’il faut tout donner !!!”.
Ce sont les meneurs d’allure du 3h, qui sont juste derrière moi.
J’ai donc ralenti au point de me retrouver sur un rythme de 3h. J’avoue — à cet instant précis — j’ai une petite pointe de déception. Mais d’un autre côté, je suis toujours bien placé.
Et dans une forme relative, pas complètement exténué.
Mes muscles répondent.
Alors, je me cale sur eux, et je tiens leur rythme.
Et je me dis que j’ai encore un peu de puissance pour lâcher les chevaux sur le dernier kilomètre.
Juste le temps de me faire filmer par la moto officielle qui devance les meneurs du 3h, et on revient au centre-ville. Et à l’intersection qui nous emmène cette fois de l’autre côté du Port de La Rochelle. Pour atteindre l’arrivée.
Et je me tiens à ma stratégie : je gueule un bon coup.
Et je tire mes jambes pour larguer les meneurs d’allure.
Ma montre indique 3'40/km.
Et c’est ainsi que je vais terminer ce 7e marathon de ma vie… sous la barre des 3 heures en 2h59'07 — temps officiel !!
I did it!
Quelques mètres après l’arrivée, on me remet déjà la médaille de finisher. Et je vais pleurer tout seul devant une barrière.
Je chiale, parce que je n’en reviens pas moi-même.
Entorse, chirurgie, entrainement de m***.
Et nuit quasi blanche.
Mais j’ai géré ma course, mon énergie, mon alimentation… et j’ai signé mon premier Sub3h.
C’est tellement invraisemblable…
Je reste comme ça, hébété devant ma barrière comme un couillon…
De longues minutes plus tard, je me remets en route vers l’hôtel. Où m’attendent douche et repas.
Et repos !
Et c’est seulement le soir que je vais retrouver ma petite tribu sur Vannes, à la sortie de la gare pour fêter ça en famille :)
#NeverGiveUp
#ViveLeSport