Finisher de l’Embrunman XXL 2024

David Desrousseaux
30 min readAug 26, 2024

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Embrunman, c’est une course mythique chez les triathlètes. En cette année 2024, l’épreuve fête les 40 ans de son existence ! L’Embrunman est une course au format ironman, mais sous label français.

Et surtout : elle se déroule en montagne, dans les Alpes.
Avec un gros dénivelé.

Il y a pire comme décor…

Au programme :

  • 3800 mètres de natation
  • 185 kilomètres de vélo, avec 5000m de dénivelé positif, et l’ascension du Col de l’Izoard
  • et un marathon de 42,195km avec un D+ d’environ 400m
Le parcours vélo est dantesque

Du lourd…

Je sais qu’il est souvent conseillé de faire un gros volume à basse intensité pour préparer les courses de type XXL. Mais…. entre le travail et les enfants, et mes autres sujets car tout n’est pas que sport / je n’ai environ que 7h d’entraînement hebdomadaire.

C’est clairement peu, quand le double, voire le triple est conseillé.

Donc, comme le temps m’est compté, je me suis surtout focalisé sur 3 axes pour préparer ce qui pouvait l’être :

  • Mon poids. J’ai perdu 4 kilos en l’espace de 2 mois ;
  • Ma stratégie d’alimentation. J’ai équipé mon vélo d’une sacoche spéciale pour pouvoir emmener à manger pour la totalité de l’épreuve, sans que cela soit trop encombrant ;
  • Faire du travail en force : fractionné sur stade, dénivelé en forêt, duathlon indoor, et musculation haut et bas du corps avec tous les exercices possibles : squats lestés, tractions, développé couché… j’en ai défini une centaine depuis l’ère Covid, ce qui me permet d’effectuer des enchainements efficaces et variés.

Et puis pour tenir mes objectifs, je me suis équipé de différents matériels :

  • Les Locminois savent que je cours quasi systématiquement avec mes enfants, avec une grosse poussette de trail de 2 places. Ce qui permet de les emmener voir les animaux de la ferme ou se promener en forêt — quand les chasseurs n’y sont pas. Et de courir malgré tout, même sur de très longues sorties ;
  • Lorsqu’il faut tondre le gazon, idem : j’utilise une tondeuse manuelle/musculaire. Qui m’oblige à faire travailler tout le corps pour m’occuper du jardin en famille, plutôt que de laisser une machine le faire ;
  • Quand on part en rando : je porte un max de trucs pour créer de la fatigue et profiter d’un moment de famille et entraîner mon corps en même temps.
  • etc.

C’est ainsi que j’arrive finalement à maintenir un programme, certes léger, mais qui a le mérite d’exister.

Zoom sur la préparation

2 mois avant Embrunman, j’ai couru sur le Triathlon M de Lorient. Et c’est mon point de départ pour calculer mon volume d’entraînement qui me sépare du 15 Août, date de LA course.

En 2 mois, j’aurais réussi à faire 1 seule sortie vélo IRL de 105 kilomètres. 3 séances sur home trainer de 2 à 3 heures. Et une grosse sortie course à pied de 2h30. Toutes les autres séances plafonnent à 1h ou 1h30. Je comptabilise même des séances de 15 minutes, essentiellement lorsqu’il s’agit d’exercices de musculation. Par exemple, une série dédiée aux quadriceps, puis de lever de jambes sur chaise romaine, pas besoin de rendre ça chronophage pour que cela soit efficace si les mouvements sont bien executés.

Voici un schéma entre les semaines 24 et 33 qui résume tout cela. Par heure consacrée par sport, et par semaine.

Récap de 2 mois de (faible) préparation

Je crois qu’on peut résumer cela par : je n’ai pas assez fait de vélo. De même, je n’ai pas assez nagé. Et surtout pas assez en piscine (bien compris le message Xav, si tu lis ces lignes ;)

Quant à la course à pied, c’est mon seul éventuel point fort. Ma VMA estimée est correcte pour mon âge, à 18,5km’h.

Jeudi 15 Août, 3h du matin.

Cela fait déjà 3 jours que je m’habitue à me lever tôt, vers 5h puis 4h du matin.

48h auparavant, je me suis levé tôt pour assister au départ des épreuves Half et Quart de l’Embrunman. Mais c’était aussi pour m’habituer au stress matinal. Car, disons-le clairement : j’appréhende la natation, surtout aux aurores. Et j’ai beau avoir “multiplié” les sorties en eau libre pour m’habituer à l’environnement, j’ai toujours un doute sur ma capacité à sortir de l’eau dans les temps. Et à ne pas me crisper une fois dans l’eau, comme c’est déjà arrivé par le passé.

Bref, ces 2 réveils nocturnes pour aller voir les départs et nager sont aussi un travail psychologique sur moi-même. Une forme d’auto-hypnose, qui a pour objectif de vivre l’événement avant l’événement. Et de me rassurer. C’est aussi une forme de coup de pied au cul : let’s do it!

Assister au départ du Half depuis la berge est très cool. Je devine que Simon de mon club de Locminé est dans le peloton de tête. Je me demande encore comment on peut courir vers l’eau pour plonger et nager efficacement, sans être étouffé par le cardio et des mouvements rapides en début de nage. Un jour j’y arriverai aussi…

Il n’empêche, j’apprécie de pouvoir assister au départ des 2 courses. C’est plutôt relaxant en vérité. Je me dis que le jour de ma course, je chercherai à retrouver cet état d’esprit, pour apprécier, et me relaxer.

Le temps d’assister aux 2 départs, je retourne ensuite chercher mon matériel de natation : combi, bonnet, lentilles… et mes nouvelles lunettes anti-buée aux verres clairs. Il ne faut pas que je tarde, si je veux profiter du fait que toutes les grosses bouées numérotées sont encore positionnées dans l’étang. Et réussir à nager avant l’arrivée des plagistes.

Ma course se déroule le Jeudi 15 Août. Le départ des Half et Quart, c’est 48h avant, le mardi. Eh bien grâce à cette organisation, le mardi j’aurai nagé 2200 mètres en eau libre. Puis le lendemain 3500, en effectuant la quasi-totalité du parcours de ma course du lendemain.

Les 2 fois, je n’ai pas cherché la vitesse, mais surtout à bien effectuer tous les mouvements de crawl. L’idée étant de vérifier si malgré tout, la barrière horaire était gérable avec la fatigue et mon niveau technique. J’ai parcouru ces 2 distances entre 1h et 1h30 tranquillement. Je sais que la barrière horaire se situe à 2h10, à la sortie du parc à vélos. C’est-à-dire qu’on a 2h et 10 minutes pour nager 3800 mètres, puis aller chercher son vélo, et sortir de la zone de transition. Autrement dit, si on consomme 10 minutes pour récupérer son vélo et s’équiper, il reste alors 2 heures pour nager.

2h pour parcourir 3800 mètres, cela revient à faire le 100 mètres en 3’09. Comment dire ?… C’est très lent.

Mes 2 sorties 48h avant la course m’indiquent que je pouvais nager en 2’30/100m facilement, sans me fatiguer. C’est encore trop lent, soyons clair. Le minimum syndical se situe entre 1’50 et 2’00/100m. Mais avec un 2’30 je suis largement sous la barrière horaire.

Alors, je vais programmer mon début de course ainsi :

  • Objectif — 3800m natation : 1h30
  • Objectif — Transition n°1 (T1) : 5 minutes

Ainsi, je pourrai sortir de la zone de transition avec 35 minutes d’avance sur la barrière horaire. Et me concentrer sur l’épreuve suivante plus sereinement.

C’est avec ce schéma que je me réveille donc à 3h le jeudi matin. Tout mon matériel est prêt. Le vélo m’attend déjà dans la zone de transition, puisqu’il fallait le déposer la veille. Là, je me concentre sur mon réveil, mon alimentation : banane, fruits secs, etc.

Ma femme m’accompagne. Notre camping n’est qu’à 5 minutes de l’aire de départ, et on y est vers 4h15. Je passe le premier sas seul, avec ma caisse sous les bras (on nous a confié une caisse la veille pour y entreposer toutes nos affaires : matériels de sport, alimentations, gourdes, etc.).

LA caisse

Puis seconde barrière, avec vérification de nos pièces d’identité.

  • Bonjour — me dit un bénévole qui m‘invite à rejoindre son couloir (NDLR : le sas d’entrée est découpé en plusieurs compartiments, par n° de dossards)
  • Bonjour !
  • Ok pour la pièce d’identité. Et votre puce ?
  • Ma……. Ma puce !!!!! Euh…. non… attendez ! Je ne l’ai pas !?
  • Ah ! Mettez-vous sur le côté le temps de la retrouver, ne vous inquiétez pas.

Sauf que…. je me rappelle exactement chaque élément que j’ai rangé dans ma caisse. Et la puce rouge n’y était pas ! Alors que je me rappelle parfaitement l’avoir récupérée 72h plus tôt dans le sac confié par les organisateurs.

Bordel dans ma tête.

Je ne vais quand même pas être disqualifié de la course avant même d’avoir commencé… ?! Et lorsque je veux ressortir du premier sas pour retourner à ma voiture, les arbitres m’interdisent de sortir !

Je n’ai plus qu’une option : appeler ma femme qui doit encore être sur le parking. Allo ? Problème… J’ai perdu ma puce. Il faudrait que tu fouilles partout dans la voiture. Le coffre, les portières. Et même à l’intérieur de la galerie, sur le toit.

5 minutes plus tard : chou blanc. Alors, je continue à patienter pendant qu’elle repart au camping pour fouiller dans toutes mes affaires.

Entretemps, les bénévoles — tellement sympas — m’invitent à préparer mon matériel dans mon emplacement, pour ne pas perdre de temps. Histoire que je m’active un peu et que je ne stresse pas en boucle inutilement.

10/15 minutes après, je suis prêt, mais toujours pas de puce. Et ma femme n’a rien trouvé au camping.

C’est pas possible…

Où est-ce que j’ai pu ranger ça ??!!

Le soir-même, ma femme retrouvera la fameuse puce au fond de notre poussette. Elle avait bêtement glissé du sac pour tomber au fond de la grosse poussette de course à pied

Il n’empêche, c’est tout penaud que je retourne voir les bénévoles et arbitres. Lesquels étaient déjà au courant que ma femme faisait tout son possible pour remettre la main sur l’objet de toutes les convoitises.

Là, je leur annonce la mauvaise nouvelle.

L’un d’eux me propose alors d’aller voir le chronométreur de la course. Et qu’il me reprogramme une nouvelle puce — s’il le peut et s’il est d’accord !

Le temps de prendre ma carte bleue (heureusement que je l’avais prise) — car la caution s’élève à 400€ par puce (!!). Et je l’accompagne à la tente de l’officiel, qui vient juste d’arriver.

Le bénévole lui explique la situation. Et le chronométreur, très sympathique et compréhensif, me reprogramme une puce sur celle d’un concurrent qui a annulé sa participation ! Ouf… Et le tout : sans me demander de nouvelle caution, juste en se basant sur la confiance !!

Il m’expliquera quand même qu’il n’a pas le droit de faire ça, et que l’organisateur de l’épreuve ne sera pas mis au courant… Il espère que je serai assez honnête pour rendre les 2 puces à la fin de l’épreuve.

Tellement gentil.

Et tout cela était tellement inespéré…

Quelques minutes après, le temps de prévenir ma chérie, je reviens à mon emplacement, et je vétis enfin ma combinaison. Je me sens déjà mieux, le stress est retombé. Avec du recul, cette mauvaise expérience aura finalement catalysé mes peurs, et je serai arrivé davantage détendu sur la plage de départ.

Le temps d’aller m’échauffer sur un petit 100 mètres dans la zone prévue à cet effet, je ressors de l’eau et je rejoins tous les triathlètes pour assister au départ des filles à 6h00. Les hommes partiront quelques minutes après.

Les femmes sont sur la ligne de départ, les hommes attendent leur tour.

Mais pas besoin de faire le foufou : je ne nagerai qu’entre 2’ et 2’30 aux 100 mètres. Je me range donc sagement à l’arrière droit du gros peloton de 1000 et quelques triathlètes que nous sommes. A droite, il y aura aussi moins de bouchons dans les virages, d’après moi. Puisqu’on contournera toutes les bouées main gauche.

La fête est à son comble… Les familles sont toutes là. La mienne fait encore dodo, je ne voulais pas que mes enfants me voient stressés. Ni les réveiller en pleine nuit pendant leurs vacances. Quant à ma femme, avec cette histoire de puce, elle est repartie au camping. Peut-être viendront-ils vers 7h30 pour me voir sortir de l’eau — Inch’Allah.

3… 2… 1… C’est parti !

La musique, les cris, le speaker… l’ambiance est ouf. Et on s’avance vers l’eau. Moi ? Je me concentre, je veille à ce que mon cardio reste bas. Et je visualise déjà les mouvements à effectuer d’ici quelques secondes.

Le temps de me retourner rapidement, je m’aperçois qu’il y a encore une bonne quantité de nageurs derrière moi. Et à voir leurs têtes, beaucoup ne sont pas du tout rassurés…

Ce bref instant me fait rappeler un atterrissage à Tanger, il y a une quinzaine d’années, lors de “mes années marocaines”. L’avion planait au-dessus de la ville, moteurs éteints, pour rejoindre l’aéroport à 15/20km de là. Les vents du Détroit de Gibraltar sont toujours très forts à cet endroit, surtout en fin de journée. Et notre avion tanguait énormément. De quoi faire crier de panique certains passagers. Ce jour-là, ces voyageurs avaient peur pour moi. Ils étaient tellement paniqués qu’ils m’avaient vidé de toutes mes craintes. Et du coup, j’étais parfaitement serein.

Et bien là, au départ d’Embrunman, je revis exactement la même situation. Je vois des têtes paniquées autour de moi. Du coup… ils ont peur pour moi. Et dans ma tête, tout va bien finalement. Mes pieds rentrent dans l’eau, j’avance encore un peu.

Et c’est parti pour 1h30 de crawl.

Mes premiers mouvements sont souples, je vois le public défiler.

Aucun problème.

Epreuve 1 : 3800 m de natation

J’atteins ainsi rapidement la bouée n°1. Entre la bouée 1 et la bouée 2, on peut toucher le fond. Certains en profitent pour marcher et s’économiser. Mais je choisis de ne pas être de ceux-là. Et je continue à nager. Lentement, mais sûrement !

Tourner 2 fois tout autour de l’Etang d’Embrun, telle est la mission !

Bouée 2, tout roule. D’autant que je nage droit. Le fait d’avoir reconnu le parcours natation ces dernières 48h aide aussi. Je sais quel angle de sortie je dois avoir après chaque bouée. Sans me poser de questions. Du coup, c’est relaxant, moins de choses dans la tête, il suffit de se concentrer uniquement sur ses mouvements.

La bouée 3 arrive rapidement. Puis la 4 et la 5 qui sont au bout de l’étang et qui forment un gros virage. Puis les bouées 6, 7 et 8 sont en ligne droite, et nous ramènent de l’autre côté de l’étang, face à la plage de départ.

Avant d’effectuer une seconde grande boucle.

+1000 nageurs dans l’Etang d’Embrun pour la course XXL

Durant cette ligne droite, je distingue à ma droite des nageurs qui — pour le coup — nagent très à droite. Dont un vêtu d’une combi orange, impossible à rater. Et là, juste par envie, je me mets à tester des choses : j’optimise l’amplitude de mes bras, la position de mes mains dans l’eau pour optimiser ma propulsion, j’essaye d’améliorer ma position hydrodynamique, etc. Mais sans augmenter la fréquence de mes mouvements de bras ni pousser le cardio. Et je vois qu’en minimisant mes efforts et en optimisant plusieurs petites choses, je le distance assez facilement ! Ma montre GPS m’indiquera que j’ai fait ainsi des passages en 1’30/100m !

Ce qui — à mon niveau — me semble tellement lointain.

Et pourtant…

840e en sortant de l’eau

3831 mètres plus tard, sur une moyenne de 2’23/100m, je sors de l’eau en 1h31:31. Je suis pile sur mon objectif.

Heureux d’y être arrivé, je reste malgré tout concentré.

Et je trotte jusqu’à mon emplacement 636.

Une fois sur place, j’enlève ma combi. Une fois en slip de bain, je mets mon cuissard Castelli. Ma ceinture cardio. Mon haut, mon casque, mes gants, mes chaussures…

Et 6 minutes et 15 secondes plus tard, je sors de la zone de transition pour m’attaquer au parcours vélo.

Ces quelques minutes peuvent paraître astronomiques, mais à mes yeux dérisoires sur ce qui nous attend. Car je fais le choix de faire le parcours vélo avec un vrai bon cuissard, des chaussettes pour éviter les frottements. Et avec mes lunettes de sport, adaptées à ma vue. Les lentilles, je ne les utilise que dans l’eau. Donc il me faut aussi nettoyer mes mains, pour enlever mes lentilles, et humidifier un peu mes yeux. Le principal étant de sortir confortablement de la zone de transition prêt à en découdre pour la suite !

A la sortie du parc à vélos, je pensais croiser les miens. Peut-être étaient-ils là, mais je ne les ai pas vus ni entendus. Ce n’est pas grave, à vélo, même si je manque cruellement d’entraînement, je ne suis pas stressé. J’ai réglé mon vélo aux petits oignons. Et j’ai pu aussi découvrir une partie du parcours. C’est bien la toute première fois que cela m’arrive d’ailleurs !

Epreuve 2 : le vélo

Une semaine auparavant, j’avais parcouru les 50 premiers kilomètres du parcours, qui consistent à faire une grande boucle autour d’Embrun. La route passe ensuite au-dessus du grand pont du Lac de Serre-Ponçon. Avant de revenir sur Embrun, et passer devant notre camping.

J’avais parcouru cette portion seul et sur une moyenne supérieure à 25km’h, sans trop forcer. Mais là c’est pareil : je ne vais sûrement pas forcer, sachant ce qui nous attend à mi-parcours.

Cette première grande boucle est assez facile à retenir. Physiquement, je n’y ai éprouvé aucune difficulté. Je m’amuse surtout à dépasser quelques concurrents. Mais en respectant toujours les règles : pas de drafting/aspiration en se plaçant derrière un concurrent pour se protéger du vent et gagner en vitesse. D’autant que les arbitres à moto sont très nombreux et font des rondes régulières autour de nous.

Des paysages splendides nous entourent

Après une grosse ascension, on atteint une sorte de plateau, avec des petites bosses. Et sur l’une de ces bosses est arrivé ce qui devait arriver : une gourde — placée à l’arrière de ma selle — chute. Et qui manque de faire tomber un gars derrière moi !

Au briefing la veille, on nous a bien rappelé que la zone est classée Natura 2000. Et qu’il est hors de question de balancer ses déchets comme ça n’importe où. Ce n’est de toute façon pas dans ma nature, donc je stoppe ma course. Le temps de courir les 20 mètres pour récupérer ma gourde et revenir à mon vélo, je me fais passer par une petite dizaine de concurrents que je venais justement de dépasser précédemment… J’avoue que — sur le coup — c’est quand même bien rageant.

Le temps de me remettre en selle, et je rattaque. Je remonte un à un ces quelques concurrents. Et on arrive enfin vers une zone que j’avais bien enregistrée : un petit mur de 22% long d’environ 20 ou 25 mètres. Je l’attendais avec impatience… Une fois ce “mur” dans ma ligne d’horizon, je me mets à accélérer pour le gravir le plus vite possible. Et … go! Mes watts explosent, je frôle les 1000w d’après ma Garmin. J’ai juste eu le temps de profiter d’un “La vache !!” lâché par un cycliste que j’ai largué dans cette petite portion.

Comme quoi effectuer une reconnaissance de parcours, ça peut servir :)

Vue sur l’Etang d’Embrun (à gauche) et le Lac de Serre-Ponçon

Ensuite, longue descente jusqu’à la départementale pour rejoindre le fameux Pont de Serre-Ponçon. Habituellement, j’adore les descentes. Sauf que là, le vent s’est levé. Et la route n’est pas toujours en bon état. J’ai juste le temps de passer un groupe de 4 ou 5 cyclistes qui zigzaguaient dangereusement à cause du vent. Mais j’avais l’impression de rouler sur des œufs. Le vent était subitement très violent, avant de se calmer tout aussi rapidement.

Quelques passages de notre descente vers le Lac de Serre-Ponçon sous un vent violent

Et de retour au Lac, j’ai d’abord constaté à quel point les bénévoles ont fait un travail incroyable : l’entrée sur la départementale est ultra sécurisée. Des bouchons se forment car les triathlètes du jour sont prioritaires.

Pas sûr que ça plaise à tout le monde :)

Mais côté sécurité, c’est parfait.

On est redescendu de notre colline, et face au Lac, le vent s’est encore intensifié. Je me dis que j’ai bien fait de m’équiper d’un vélo de route traditionnel, avec des jantes de montagne. Car une hauteur de jante de 3 ou 4 centimètres aurait fait une grosse prise au vent. Et n’aurait pas simplifié la tenue de route.

On arrive sur le pont, long de 1 kilomètre.

En plein milieu du lac, le vent devient vraiment dangereux.

Ce pont est vraiment impressionnant !

Je m’accroche sur toute la largeur de mon guidon en baissant l’avant de mon corps au maximum pour minimiser l’impact de cette masse d’air. Les voitures nous frôlent, mais roulent au ralenti.

A cet instant, un triathlète me dépasse, en position aéro sur son vélo type CLM. Autrement dit, il est équipé de jantes profilées, et tient son guidon avec le bout des doigts…

Il est fou, me dis-je…

J’ai ainsi failli être le spectateur d’un gros carton puisque le triathlète en question s’est mis à tanguer dans tous les sens avant de fortement ralentir. Pile devant la voiture qui nous suivait sur la gauche…

Chanceux le gars…

Arrivé au bout du pont, le vent se calme, et il nous reste environ 10 kilomètres pour rejoindre Embrun, puis effectuer le virage devant le camping où nous avions planté notre tente. Mais cette portion n’est pas très intéressante, elle vise juste à rejoindre les zones de la course. Car on est sur des départementales bien droites, avec un vent toujours en embuscade. Et des voitures partout…

Bref, 1h45 plus tard je passe devant notre camping. Mais je n’y croise personne :(

Il n’empêche : ma moyenne est d’environ 25 km’h comme la semaine passée, et je me suis déjà bien alimenté et hydraté depuis tout le début de la course.

Il reste environ 140km à parcourir en vélo, avant de courir le marathon.

En route pour le Col d’Izoard !

Les 30 kilomètres suivants ne posent pas de véritable difficulté. On parcourt une voie nommée “Les balcons de Durance” qui nous emmène jusqu’à Guillestre. Lieu que je considère comme le vrai point de départ de l’ascension du Col. Car j’ai parcouru cette portion en voiture le week-end précédent et j’ai pu me rendre compte que c’est surtout une zone de transition entre Embrun, et le début de l’ascension incessante du Col.

En route pour l’Izoard

Arrivé à Guillestre, je reconnais le parcours.

La raison ? Je l’ai parcouru 2 fois en Juillet, via l’application Rouvy, sur home-trainer. Certes, les conditions ne sont pas les mêmes en mode IRL. Mais j’ai pu reconnaître ainsi le parcours depuis la lointaine Bretagne.

J’ai tout retenu : la sortie de Guillestre, le passage en corniche dans 4 tunnels de montagne, puis une route qui continue de grimper le long de la Durance. Avant un virage très serré — où les bénévoles feront à nouveau un travail formidable — qui nous emmèneront vers Arvieux, puis La Chalp et enfin Brunissard avant de — vraiment — escalader les derniers kilomètres.

1 mois avant la course, sur Rouvy

Bref, tout cela je savais à quoi m’attendre. Et comment doser mon effort. Sur mon simulateur, j’ai effectué 2 fois le parcours en 2h05, puis en 1h58. Le tout sans trop d’effort, mais sans soleil, ni vent, et dans le confort du domicile.

Tout le parcours jusqu’Arvieux s’est plutôt correctement déroulé. J’étais dans un groupe assez compact de cyclistes, mais qui respectait bien les distances imposées par le règlement. Le problème, c’était surtout le soleil qui commençait à montrer le bout de son nez. Et mine de rien… la barrière horaire qui ne semblait pas si confortable que cela !

Très franchement, je ne forçais pas en vélo. Mais je n’étais pas non plus en mode lenteur extrême. Je pensais pouvoir tenir un 25 km’h de moyenne. Mais vu que je connaissais le parcours, je passais surtout mon temps à compter le temps qui me séparait du haut du Col à franchir, tout en conservant un minimum d’énergie pour le marathon — si tant est que j’arrive jusque là. D’autant que je savais qu’à 3 kilomètres du Col, la route descendait pendant 1 kilomètre avant de remonter sur les 2 derniers kilomètres.

J’avais même compté le nombre de virages à passer.

Bref… Ma tête était en mode calculatrice “On est au 65e, donc il reste 22 kilomètres avant le sommet du Col. Donc, on est à 19km de la zone facile, avant de remonter”. Et ainsi de suite à chaque kilomètre. Histoire de me persuader que “ça va”. Car la barrière horaire consistant à pointer à 13h10 maximum au sommet du Col me semblait très confortable au début. Et au fur et à mesure que j’avançais — finalement pas aussi vite que prévu la barrière me semblait accessible, mais un peu limite vu mon rythme.

A nouveau, comme sur l’Altriman en 2023, je manque d’expérience tout court. À vélo, je ne fais quasi que du home-trainer. Quant à rouler en montagne, n’en parlons pas. J’ai des expériences furtives, mais rien qui consolide vraiment ma course. A chaque ascension, c’est un éternel recommencement, où je cherche à trouver le bon compromis entre énergie consommée et rythme de course…

Bref, arrivé à Arvieux, un nouvel ennemi vient se mêler à tout cela : la chaleur. J’ai eu une grosse insolation l’année précédente sur Altriman. Cette année, la météo semble plus conciliante. Sauf depuis que j’ai amorcé le virage en direction d’Arvieux.

Arvieux, 1 minute d’arrêt !

Arrivé à Arvieux, je m’arrête immédiatement à la zone de ravitaillement — la première dont je profite depuis le début de cette course. Et je m’asperge d’eau plusieurs fois, pour baisser ma température corporelle. Je bois, je remplis mes gourdes, et je repars quelques minutes après. Je passe ainsi rapidement la Chalp.

Puis Brunissard.

A la sortie de Brunissard, je fais une rapide pause technique au petit parking qui se situe à l’amorce du premier virage. Lequel marque le véritable début de l’ascension. Je connais ce parking — grâce à Rouvy — mais aussi pour avoir reconnu le parcours de l’Izoard le week-end dernier.

On était monté en famille jusqu’en haut du Col, puis j’avais tout dévalé pour tout remonter depuis Brunissard en 30 minutes. Ce jour-là j’étais frais. Mais j’avais reconnu chaque virage découvert auparavant grâce à Rouvy. Et vérifié la puissance en Watt qu’il me fallait développer, d’après ma Garmin.

J’étais très surpris qu’à 10/12 km’h de vitesse d’ascension simplement, mes watts étaient très bas. J’oscillais à moins de 100 Watts facilement. Ce qui n’est vraiment pas grand chose… En effet, je moulinais facilement, sur mon rapport 32x36. Un rapport “facile” mais que j’avais préparé spécifiquement pour l’occasion. L’idée étant de réussir d’aller au bout, donc l’économie d’énergie que représentent quelques dents sur mon rapport de vélo sont autant d’avantages à ne pas ignorer, selon moi.

Bref, je fais donc face à ce premier virage en sachant exactement ce qui m’attend. Ce qui est une énorme différence par rapport à toutes mes précédentes courses. Je suis prêt, déterminé, et il me reste 1 grosse heure avant la barrière horaire.

Let’s go!

Immédiatement, malgré la fatigue et la chaleur, je suis dedans. Je vois devant moi des cyclistes qui galèrent déjà. Je les passe sans difficulté. Puis j’alterne entre danseuse et moulinage. Sans changer de rapport. Si bien que j’avance lentement en mode danseuse. Mais j’économise une partie de mes muscles. Puis, je me rassieds, je mouline, et je remonte à 14/15km’h parfois sur les ascensions.

Tout va bien ainsi jusqu’à la fameuse zone 3 kilomètres avant l’arrivée.

Un endroit magnifique, qui ressemble à une mine, avec une vue imprenable.

Incroyable cet endroit !

Puis 5 virages simples qui nous amènent en haut du Col.

Je me motive en me disant que je vais y arriver, malgré ma préparation à ch*** !!!

Et quelques minutes plus tard… Me voilà en haut du Col !

I did it!

Ambiance en haut du col

Initialement, j’avais prévu une pause de 5 minutes à cet endroit. Mais vu que ma moyenne n’était pas celle prévue. Que j’ai déjà fait une pause à Arvieux et une micro pause peu après. Que mes gourdes sont remplies et que mon sac alimentaire est toujours bien garni — malgré le fait que je mange toujours aussi régulièrement. Et surtout, un bouchon de cyclistes attendant leurs sacs personnalisés de ravitaillement. Et environ 30 minutes d’avance sur la barrière horaire simplement. Tout cela n’a fait qu’un tour dans ma tête : une fois arrivé, j’ai poursuivi immédiatement ma route sans m’arrêter. M’arrêter pour quoi faire ? Il faut que j’arrive à Pont-Neuf avant 16h25 et surtout avant 17h15 à l’entrée du Parc à vélos pour enchaîner sur la course à pied !

Où m’attend donc un marathon avec un gros dénivelé…

A partir de là, je découvre complètement le parcours. On est aux environs du 100e kilomètre, et il reste moins de 90 kilomètres à rouler. Je sais qu’on a une longue descente jusqu’à Briançon. Mais ensuite… A part quelques bosses que j’ai notées sur mon guidon pour mesurer mon avancée, difficile de savoir exactement ce qui m’attend.

Malgré tout, j’entame la descente assez sereinement. Je n’ai pas peur des descentes, même si je sens des limites à mon vélo au-delà des 70km’h. Trop de tremblements. J’atteindrai régulièrement cette vitesse, qui me permettra de sauter pas mal de concurrents. Dont des gars sur de véritables fusées pourtant…

Il y a juste un gars avec un nom hispanique — Gustavo. Son nom “Gus” est marqué sur son dos. Facile à retenir car des supporters itinérants n’arrêtaient pas de nous suivre entre Guillestre et Arvieux, et scandaient son nom. Difficile à oublier quoi. Je suis à 70km’h voire légèrement au delà, et le gars me passe comme un taré. Et arrive dans le virage à une vitesse folle. Il a failli se manger le mur, je ne sais même pas comment il a fait pour rester en selle…

Je le laisse passer, et je reste 20 à 30 mètres derrière lui.

Histoire qu’il m’ouvre un peu la route.

Car les voitures sont censées être interdites en contre sens aujourd’hui. Mais on ne sait jamais… Suffit d’un abruti qui ne respecte pas les règles pour qu’on finisse à l’hosto…

30 kilomètres plus loin, on se retrouve à Briançon

Où les bénévoles font toujours un travail aussi remarquable dans les ronds-points, les carrefours, et dans les zones bouchonnées. Les voies de gauche nous sont ouvertes, les voitures nous laissent toutes passer.

Le fait d’avoir foncé ainsi dans la descente m’assure un nouveau coussin horaire sur la barrière. On passe près de Mont Dauphin, un autre village fortifié, qui ressemble de loin à Embrun. A cet endroit, je commence à sentir un fort torticolis. A force d’être tout tordu dans les descentes pour gagner en vitesse, mon cou a pris cher… Et il doit rester environ 50 kilomètres à parcourir.

On est de retour sur les Balcons de la Durance, la route recommence à devenir abrupte. Et soudain, devant moi : un mur.

Vraiment, la route prend subitement des %.

Et je n’en vois pas le haut.

Aïe…

THE mur

Comme quoi faire une reconnaissance du parcours jusqu’au bout m’aurait permis d’anticiper cette portion. D’autant que le soleil fait mal, mes gourdes sont quasi vides, je suis bien assoiffé.

Alors je m’accroche… Mais au bout de quelques minutes, je n’avance pas. Je pose le pied à terre, et j’avance quelques mètres en marchant. Les cyclistes me rattrapent tellement lentement, ils ne doivent pas dépasser les 8km’h sur cette pente.

Du coup, je me rends compte qu’en marchant, je m’économise pour mon marathon, plutôt que de m’esquinter ici. Sportivement, ce n’est pas très glamour. Mais — comme le disait un de mes anciens clients — l’Histoire ne retient que le résultat.

Toujours est-il que j’atteins le haut de cette méchante bosse un bon paquet de minutes plus tard, avant de redescendre vers Embrun. Là, le torticolis ne m’aide pas à descendre aussi vite qu’avant. Mais il me semble que côté barrière horaire, je suis OK. Donc, mieux vaut descendre à 40km’h et avancer quoi qu’il arrive. Que de se forcer à aller plus vite, et de tomber bêtement à cause du manque de discernement.

On revient ainsi à l’entrée d’Embrun, et je passe le dernier passage horaire de Pont Neuf dans les temps.

Il reste environ 15 kilomètres à parcourir.

Ma voisine de camping — dont le fils avait couru il y a quelques années sur cette course — lui avait dit que c’était la partie la plus difficile selon lui. L’entrée dans Embrun nous fait un peu grimper, mais j’ai encore les jambes. Et j’arrive vite dans le centre ville. Puis, après quelques carrefours, on sort vers le nord de la ville, direction…

Effectivement, ça grimpe.

C’est sadique” me dis-je…

Je me rappelle très bien de cet instant où je me retrouve face à cette route sinueuse dont je ne connais rien, et où…

Bah, j’en ai juste marre en fait.

Torticolis, fourmis dans le bras gauche, crampes dans les triceps, grosse chaleur, bref… Là, c’est sans fin. D’autant que ça doit grimper environ 6 ou 7 kilomètres d’après mes estimations.

Inutile de dire que là, j’ai subi. J’ai posé le pied à terre plusieurs fois, j’ai continué à manger et à boire pour conserver le peu de force qu’il me restait.

Puis je me suis relancé.

Et ainsi de suite 3 ou 4 fois.

Jusqu’au bout de ces derniers kilomètres.

Avant d’entamer la dernière descente vers la zone de transition.

On m’avait aussi prévenu que cette descente était dangereuse et pleine d’ornières. Et je confirme, c’est bien le cas !

Cette descente n’était pas une partie de plaisir.

Mais j’avoue que d’entendre à nouveau le speaker, l’ambiance sur la zone de transition, savoir que je vais passer avec plus d’1 heure d’avance la barrière horaire pour pouvoir enchainer ensuite mon marathon…

Je voyais cette arrivée du vélo comme miraculeuse au vue de ma préparation tellement faible…

Retour à la zone de transition !

8 heures 47 minutes et 44 secondes de vélo plus tard

J’arrive devant la ligne de transition, je pose enfin le pied à terre ! Et j’aperçois les miens en train de m’acclamer de l’autre côté de la grille.

Et… J’éclate en sanglots…

Je continue quand même à pousser mon vélo jusqu’à mon siège 636.

Mais je me sens submergé par l’émotion.

Ma femme, mes enfants et mon père sont à fond, je leur fais un signe de victoire du bras.

J’y suis arrivé.

Je vais y arriver.

Parce que le marathon ne me fait absolument pas peur. Bref, j’ai énormément d’émotions qui traversent ma tête.

Une fois revenu à mon emplacement, j’essaye de faire un peu le vide. Je me reconcentre sur ma préparation pour la course à pied. Notamment, je dois déplacer mes semelles orthopédiques de mes chaussures de vélo vers mes chaussures de course à pied (PS pour les bretons : semelles réalisées chez Josselin BELARD DU PLANTYS, podologue à Bignan — au top !).

Et puis je me pose quelques minutes pour m’alimenter avec un sandwich laissé sur place.

Mais je ne ressens aucune crampe ni douleur autre que celle de mon torticolis. Rien qui ne devrait me gêner en course à pied ! Lorsque tout à coup, 2 jeunes bénévoles arrivent vers moi et me proposent un massage de mollets et de cuisses.

Comment refuser là maintenant tout de suite un tel massage ? J’ai plus de 6h devant moi pour arriver au bout du marathon. Alors, que je vise de le finir en 4h.

Alors j’accepte avec plaisir.

Et même si ma transition aura ainsi duré quasiment un quart d’heure (14’47) j’attaquerai le marathon dans les meilleures conditions.

Au moment de sortir de la zone, je recroise ma famille. Ma petite fille qui me voit sangloter, derrière une grille, ne comprend pas ce qui arrive à son papa… Et se met à pleurer avec moi. Mais ça fait tellement chaud au cœur de les sentir derrière moi à ce moment précis. D’autant qu’ils s’étaient même organisés pour fabriquer des pancartes pour m’encourager :)

Emu… mais concentré sur ma remontée

Juste avant de sortir de la zone de transition, il y a déjà une première zone de ravito. J’y prendrai ce que je prendrai partout : de l’eau, des petites tomates et 1 ou 2 tucs. Jamais de gel, ni de sucre rapide qui détruiront ma course. J’ai 7 marathons à mon actif, et je sais que les gels ne m’aident pas vraiment sur ces distances. D’autant que là au bout de 10 heures d’effort, je ne pense pas que mon estomac soit dans sa meilleure forme non plus…

Et c’est parti pour 3 boucles autour d’Embrun

Ma stratégie est simple : pour avoir brièvement reconnu le parcours la semaine passée, je ne forcerai pas dans les montées. J’y ferai de la marche rapide. Puis, je tiendrai un bon rythme sur le plat sur une vitesse moyenne de 5min./km et j’accélèrerai dans les descentes autant que possible. Et c’est — à peu de chose près — le plan initial que je tiendrai sur toute ma course.

Le parcours tourne autour d’Embrun, 3 fois !

Le soleil laisse place à des nuages

Ce qui est idéal pour nous tous, car les températures devraient légèrement baisser. Dès le 4e kilomètre, on grimpe jusqu’à Embrun. On arrive alors au centre ville où l’ambiance est sur-vol-tée !

J’y croise alors Simon qui m’encourage et court quelques mètres avec moi.

Puis, on amorce une descente en virage.

Avant de se retrouver au bout de la ville et courir le long de la Durance pour 4 kilomètres jusqu’à la fin de la boucle.

4km le long de la Durance

Comme prévu je m’arrête à chaque ravito

Je cours avec ma petite gourde Flask et sa paille. Ce qui me permet de boire de l’eau régulièrement par petites gorgées. Mais l’eau part vite. Et je m’arrête donc systématiquement plusieurs poignées de secondes pour bien boire, manger, puis repartir. Mon rythme de course est donc légèrement supérieur à celui de 4h de marathon prévu.

Mais je devrais réussir à éviter de courir lorsque le soleil sera couché, et de sortir la frontale.

De retour à la zone de transition, je connais entièrement le circuit désormais. Une petite fille me lance, hilare, un “Plus que 28 kilomètres, Monsieur !”…

Ouais…

Mais ça va le faire quand même ;)

La seconde boucle se déroule sans encombre. Si ce n’est que je m’arrête de temps en temps pour aider mes compères. Certains complètement crampés, d’autres en train de vomir par terre… Je leur propose de l’eau, ou un truc à manger que j’aurais sur moi.

Ils refuseront tous mon aide, mais je préfère avoir fait le geste, car j’aurais apprécié qu’on le fasse pour moi.

Tout cela me coûte un peu de temps, certes

Mais je constate quand même que j’ai un meilleur rythme que la quasi-totalité des coureurs que je croise. Et j’avoue que sur les 3 derniers kilomètres, qui nous emmènent vers la ligne d’arrivée, j’ai commencé à hausser le rythme. Je voyais au loin 5 ou 6 coureurs que je pouvais aller chercher. Alors mon rythme s’est accéléré. Je me suis retrouvé sous les 5 minutes au kilomètres, mais cela créait déjà un différentiel de vitesse énorme par rapport à mes concurrents directs.

J’ai même eu droit à mon second “La vache !” du jour en dépassant un énième concurrent.

Un anglais me voyant courir au loin était complètement déchaîné à mon passage “You’re strong maaaaannnnnn!!!!!!”.

Tout cela me donnait des ailes, et je continuais à hausser le rythme. Je voulais en passer le plus possible avant l’arrivée. Mais après avoir passé tout ce beau monde, je ne voyais plus personne à l’horizon.

J’essayais de maintenir ce rythme d’enfer.

Et quand le miracle de la ligne d’arrivée s’est posé devant moi, j’ai commencé à piquer un sprint :)

J’étais sous la barre des 4min./km jusqu’à la ligne d’arrivée !!!!

Finisher du marathon en 4h24’31

Mais surtout… FINISHER de l’Embrunman 2024 en 15h05’13 !!

15 heures plus tard… et plus de 2 heures d’avance sur la barrière horaire, après avoir dépassé 326 concurrents après la natation, j’ai le sentiment du travail accompli.

Je suis au bout de moi-même, je me sens fébrile.

C’est vrai que j’ai bien forcé sur la fin du marathon…

Je vois à nouveau ma tribu en train de me féliciter de l’autre côté de la grille. J’éclate à nouveau en sanglots…

Puis, je me pose rapidement sur une barrière. Le temps de récupérer ma médaille de finisher.

Et déjà on passe en mode logistique

Il faut récupérer ses affaires, pour rentrer, que les enfants n’aillent pas dormir trop tard, etc. Mais le plan ne se passera pas comme prévu finalement.

Car le temps d’aller récupérer mes affaires, j’ai la tête qui tourne.

Un bénévole va alors m’aider à transporter mes affaires et mon vélo jusqu’à la zone de sortie.

Là, je dois rendre ma puce.

Le temps d’expliquer mon histoire de puce du début de journée, je sens que je vais faire un malaise.

Alors, je m’assieds près des bénévoles…

Et ma soirée va finalement finir à l’infirmerie.

On me transporte jusque là, sous observation médicale. Ma femme et ma petite fille vont m’y rejoindre, tandis que mon père et mon fils nous attendront à l’extérieur.

Je resterai alors en observation une bonne demi-heure, à manger et boire. Et à écouter les conseils du médecin, pour éviter les diarrhées et autres désagréments qui peuvent nous impacter après une telle épreuve. Ma femme et ma petite fille me donnent la force pour quitter l’endroit debout sur mes jambes. Et à retrouver mon père et mon bonhomme quelques minutes après.

Retour au camping pour un bon gros dodo.

Mission accomplie !

Preuve est faite qu’on peut s’entraîner peu mais efficacement

Pour réussir à boucler ce genre d’épreuve. Ce n’est clairement pas optimal ni à recommander car le foncier et le volume restent importants. Mais j’ai un ami qui se reconnaîtra s’il lit ces lignes ;) qui m’a dit un jour “Le sport est la chose la plus importante, après tout le reste”.

Et oui…. Il y a beaucoup de choses qui peuvent passer avant le sport si on veut rester marié et bien s’occuper de ses enfants.

Est-ce que je referai une telle épreuve ?

Franchement, je ne crois pas. Je n’ai pas besoin de courir un certain nombre de courses au format Ironman pour collectionner les médailles. J’ai réussi la plus grosse de ces courses. Alors, on passe à la suite.

La suite ?

We’ll see, il y a tellement de choses à faire !

#ViveLeSport

#NeverGiveUp

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David Desrousseaux
David Desrousseaux

Written by David Desrousseaux

Entrepreneur, Ecommerce & digital consultant — Sport passionate / Challenge lover

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